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WebLog de Michel Lesbats

Un blog de plus... pourquoi faire? Participer au débat citoyen, bien sûr, mais associé aux thèmes des domaines de la prévention des risques, de l'Ecologie , de l'aménagement et du développement durables: un portail de discussions et de réflexions sur tous les types de risques et la façon de les gérer.

Préjudice "économique"/préjudice "écologique"


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Un jugement récent qui va faire jurisprudence ?


Le 16 janvier 2008,  la 11e Chambre correctionnelle du tribunal de Grande Instance de Paris a rendu son jugement dans le procès de l’Erika.
"Lorsque des faits constituent une infraction aux dispositions législatives reconnues à la protection de la nature et de l'environnement, à l'amélioration du cadre de vie, à la protection de l'eau, de l'air, des sols, des sites et paysages ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances (...), les associations peuvent demander réparation du préjudice résultant de l'atteinte portée à l'environnement". Cet effet doit être une "atteinte effective des espaces naturels sensibles."
"Les collectivités territoriales qui reçoivent de la loi une compétence spéciale en matière d'environnement leur conférant une responsabilité particulière pour la protection, la gestion et la conservation d'un territoire, peuvent demander réparation d'une atteinte causée à l'environnement sur ce territoire."

Le préjudice écologique ?
L’intérêt du procès est la reconnaissance de la notion de  « préjudice écologique. ». De nombreux auteurs, ces jours derniers ont souligné le fait que cette notion n’est pas nouvelle dans le Droit Européen et dans la jurisprudence - procès de 1977 à Bastia de la Montedison/Boues rouges ou  principe selon lequel le pollueur doit être le payeur qui a été posé dès 1992 par l’article 174 du traité qui instituait la Communauté Européenne.
Par contre le 21 avril 2004  le Parlement Européen et le Conseil des Ministres de l’Union Européenne ont adoptés directive n° 2004/35/CE sur la responsabilité environnementale et la réparation des dommages environnementaux.. En effet, la Commission a annoncé, en février 2007, son intention de faire reconnaître les « crimes environnementaux ». Cette proposition de directive contraint les États membres à « traiter les atteintes graves à l'environnement comme des infractions pénales et à veiller à ce qu'elles soient effectivement sanctionnées ». Des peines maximales de cinq années Autre élément passé inaperçu c’est le 6 novembre 2007 à la suite du Grenelle de l’Environnement que la France va disposer d’ un projet de transposition de la directive . M le Ministre Borloo a confié (à la suite du Grenelle) à  Madame Corinne Lepage une mission sur la gouvernance écologique : l'accès du public à l'information, l'instauration de pratiques d'expertise pluralistes et contradictoires et le renforcement de la  responsabilité des entreprises. Le rapport préconise la création d'un "délit de délinquance écologique" ainsi que l'instauration de "dommages et intérêts punitifs" et l'extension du "champ de la mise en danger délibérée au risque sanitaire et environnemental".
Ces mesures seront-elles adoptées ?

Du nouveau pourtant !
Quelque chose est pourtant nouveau dans cette décision de Justice : lier ce préjudice écologique à des acteurs qui ont, d’après la loi ou en fonction  d’une responsabilité morale ou sociale, le devoir de le gérer au niveau d’un territoire est un concept nouveau .
Les collectivités et les associations seront, sur ces sujets des acteurs de responsabilité et de décision qui vont dorénavant compter. Ceci constitue donc un Droit à la récolte des dé-dommagements issus de préjudices écologiques qu ’il va falloir définir, chiffrer, … Gageons que de nombreuses associations vont travailler dans ce sens dans les mois à venir.
L’INRA ou des experts d’économie environnementale proposent déjà de modalités de chiffrages des préjudices écologiques .
Les méthodes évaluent d'une part les  pertes « d'aménité1 » et celles liées à la perte « environnementale pure ».
Depuis une dizaine d'années, les juges tournent autour de ces notions sans jamais oser les aborder de front. Préjudice écologique », « dommage écologique » ou encore de « dommage environnemental ». Les juges préfèrent avoir recours à des notions plus classiques  comme celle  de « préjudice moral » ou de dommages ouvrant droit à des « indemnisations ou dé-dommagement, financiers » (sans ouvrir la porte à des compensations financières vraiment élevées).
 Ces temps seraient-ils révolus ???

Comment monétariser la nature pour « la » dédommager ?
Est-ce souhaitable ?
Peut-on assimiler cela à une « marchandisation de la nature» notre bien commun ?
Essayons plutôt de faire intervenir de nouveaux modes de chiffrage des coûts : écologiques, sociaux, culturels et économiques ?.. N’est ce pas cela qui devrait animer la réflexion sur le « contentieux » en matière d’Ecologie et de développement durable ?
Dites-moi ce que vous pensez de cela ?

Portaildurisque/Michel Lesbats

Documents
Le FIGARO « Le préjudice écologique, une grande victoire » 16/01/2008
MEDAD « La notion de préjudice écologique reconnue par la Justice »



1 Les aménités rurales sont « les attributs, naturels ou façonnés par l’homme, liés à un territoire et qui le différencient d’autres territoires qui en sont dépourvus » (OCDE). Qualification positive de certains espaces et/ou de relations sociales (qualité de l’eau, paysage, patrimoine, biodiversité, récréation, attractivité, qualité de vie….) elles ont donc des dimensions naturelle, économique, sociale ou culturelle.

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